La Phénoménologie Critique en tant que fondement des Sciences (11)

0 21
Avatar for Enforsys
3 years ago
This book, originally published in French, is part of my Collected Works, which I have published under the moniker "Intoccabile". Perhaps one day, this book will receive the translation it deserves!

Lien vers la première partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-1-dd9bcc6a

Lien vers la deuxième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-2-41e5e588

Lien vers la troisième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-3-38823499

Lien vers la quatrième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-4-833a9ee6

Lien vers la cinquième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-5-1bd22b41

Lien vers la sixième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-6-78332d94

Lien vers la septième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-7-27f37839

Lien vers la huitième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-8-6fd150b6

Lien vers la neuvième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-9-c82f30e2

Lien vers la dixième partie: https://read.cash/@Enforsys/la-phenomenologie-critique-en-tant-que-fondement-des-sciences-10-61333954

...

Quick note: this is non-syndicated content. This book, in its present form, has never been published online. Enjoy and please ask questions in the comments section if you have any.

...

2. La phénoménologie critique et la question de l'être

C'est faire preuve de « profondeur », mais au mauvais sens du terme, que de « faire sortir un concept du chapeau », puis de réitérer sans fin le concept ainsi posé tandis que la chose demeure dans le plus grand vague : apothéose de l'incompétence.

Ainsi sommes-nous pressés, liés comme nous le sommes à cet esprit de rigueur, de sérieux philosophique qui caractérise si bien la phénoménologie critique, laquelle s'avère être le type même de toute philosophie scientifique possible, de préciser la teneur du concept d'Être: il en va de la bonne marche du discours.

Qu'entend donc le phénoménologue par être ?

On s'en doute, la phénoménologie critique défend une conception bien particulière de l'être, de l'essence - lexies synonymes dans le contexte de cet ouvrage.

Quelle en est donc la teneur ?

...

Il conviendrait, avant de procéder à la résolution de cette question décisive, de faire retour, afin de consolider nos acquis, sur le concept sommaire de phénoménologie critique tel qu'il s'est trouvé à être posé dans le corps de l'introduction.

Que nous est-il permis, au stade actuel de l'exposé, d'affirmer au sujet de la phénoménologie critique ?

La phénoménologie critique en tant que Grand chemin, en tant que discipline de fond - au fond des sciences -, ou autrement dit pré-scientifique, ce qui n'est pas dire moins scientifique, au contraire : plus scientifique que les sciences elles-mêmes, rend possible la prise en vue, la saisie de l'être des objets et ainsi, pour faire le lien avec la matière de la préface, permet le rétablissement de l'homme dans sa «patrie». Le rétablissement de l'homme dans sa patrie, ce retour de l'exil loin de l'être, est l'acte de mise à mort du Verfall, du « chuter au sein des objets ».

Pour l'homme revenu du vide d'un monde prosaïque et désertique, au sein duquel l'être n'est qu'oubli, à la chaleur du foyer, au parfum du familier de la « substantielle patrie » s'ouvre un monde, celui de la Pensée, puis de la Parole, définie, nous l'avons vu, en opposition au « bavardage ».

La possibilité de la saisie de l'être des objets, de leur essence, en une perspective critique par la phénoménologie est la possibilité de la scientificité en général.

Sonnons le glas de cette récapitulation en réitérant que c'est sur le fondement de la vision des essences, telle que la rend possible notre discipline, que devra se constituer le système des sciences: les objets saisis en leur ipséité se répartissent en régions d'objets, en domaines pris en charge par des sciences particulières, soit empiriques, soit purement éidétiques, selon la nature des objets saisis en leur essentielle généralité.

...

Ayant fait retour sur nos précieux acquis, ayant compris en un regard la totalité du chemin de pensée jusqu'ici parcouru, il nous est permis d'aborder l'esprit en paix la question de l'être.

Il a été question jusqu'ici d' « être », mais qu'entendons-nous donc par là ? Qu'est donc cet « être », cette vapeur, ce nuage rose diront certains, avec lequel cette verrue universitaire nous rabat si bien les oreilles ?

La très circonspecte et sereine phénoménologie, avec ses hautes prétentions de rigueur et de prudence scientifiques, ferait-elle usage d'un concept d'être indéterminé ? Quelle conception de l'être la phénoménologie critique défend-elle ? Le principe de clarté discursive nous ordonne de fournir au lecteur les précisions nécessaires. Et le phénoménologue que nous ne cessons jamais d'être s'empresse de sauter dans l'arène, de déchirer sa chemise et de donner satisfaction au lecteur.

En ce qui concerne notre discipline, la phénoménologie, l'être est le sensible même, l'objet en chair et en os. L'être n'est pas Idée (Platon), suprasensible, ou encore arrière-monde vaguement sublime, sphère plus « authentique ». L'être, pour le phénoménologue est le fait même. La vision de l'étant, de l'existant, du « devant-moi », est vision de l'essence, de l'être. La constellation des apparaîtres de l'objet est l'être. Aucune distinction entre le sensible et l'être. En quelque sorte, pour reprendre en déformant, selon notre habitude, une formule philosophique à la mode, la transcendance est l'immanence.

Une telle conception de l'être - le concret et l'être ne font qu'Un -, toute innocente, « terre à terre » et plate qu'elle paraisse, affecte d'une manière absolument remarquable l'ensemble du système des sciences constituées.

Précisons notre pensée.

Que l'on considère la psychologie des profondeurs, la sociologie sous la forme de la critique des idéologies ou critique de la domination ( Ideologiekritik ), la sociologie de la connaissance, ou encore le matérialisme historique, etc. Ces disciplines, qui étrangement rappellent le dédain des linguistes transformationnels pour la structure superficielle, procèdent par sursomption de l'apparence pour en arriver à l'essence : l'apparence serait le faux ou le problématique qu'il faudrait surmonter et nier pour en arriver au vrai, à l'au-delà du faux, à l' « être », justement. L'apparence, toujours inconsistante et inessentielle, « inauthentique », exerce un charme et en tant que Deckbild voile le réel véritablement réel. L'affinité, chez certains théoriciens, du monde de l'apparence avec le rêve et le délire ( caractère phantasmatique de l'apparence ) est évidente et fonde justement cette démarche sursomptive qui saute par-dessus la tête du monde des « apparences illusoires », fonde cette démarche archéologique « qui creuse en profondeur ». Ainsi, pour la psychologie des profondeurs, le contenu manifeste, l'immédiat, doit être dépassé, car ses déterminations concrètes sont inscrites dans le latent, le plan du vrai. Pour le matérialisme historique, la conscience sociale fausse se doit d'être sursumée par la conscience vraie des rapports de production, lesquels ne sont pas sans posséder une certaine teneur injonctive. Le mode d'opération de la sociologie de la connaissance est à rapprocher de celui de la critique littéraire d'inspiration psychanalytique - à l'interprétation littéraire en général : la critique psychanalytique n'en est qu'une modalité - «conçue comme recherche de significations cachées» ou encore de la théorie artistique dite « des intentions » ( le commerce des intentions dégénère inévitablement en impressionnisme ou en biographisme ), laquelle sursume le dit ou le fait pour aller au tu : le dit, le fait, n'ont de valeur que pour autant qu'ils rendent possible, en tant que coquille vide à abandonner là-derrière, l'accès au bonbon - le monde des choses « vraies ».

Bref, tout un ensemble de sciences - et non seulement humaines - opèrent par sursomption de l'apparence, cette sursomption de l'apparence étant conçue comme condition de possibilité de l'apparition du vrai. Ce mode d'opération procède d'une entente de l'être, du vrai, en tant que séparé, distinct du montré, de l'immédiatement saisissable par les sens, du concret.

Mais si l'on affirme - la démonstration de cette affirmation, effectuée en un dialogue vivant avec les grands auteurs de la tradition métaphysique, devra attendre le second volume -, avec le phénoménologue, que l'être n'est pas au-delà, ou derrière, ou même sous l'étant, mais est l'étant même, c'est ce mode d'opération commun à certaines sciences humaines qui se voit invalidé. Du même coup, les résultats obtenus à l'aide de ce mode d'opération deviennent immédiatement problématiques. Il n'est plus possible, si nous voulons être conséquents, d'admettre ces résultats tels quels si la conception de l'être qui fonde la démarche critique par sursomption devient elle-même question, et par là-même, éminemment questionnante.

Si l'être n'est pas caché derrière le sensible mais est le sensible même, si le vrai n'est pas le tu (ce qui est, dit-on, passé sous silence) mais le dit-sans-détour, si le vrai est l'apparence, le simple montré, alors cette démarche qui consiste à considérer la signification vraie en tant que trésor, à sauter par-dessus la tête de l'immédiatement saisissable, du concret, pour aller vers l'Autre posé en tant que plus authentique, plus vrai, ne tient plus la route.

La position d'un concept d'être en tant qu'incarné dans l'étant ne laisse pas l'édifice des sciences intact. Il problématise les résultats obtenus à l'aide de la méthode de la sursomption de l'apparence en tant que condition obligatoire d'accès au vrai.

...

Onzième partie - Notes

  1. Comme l'affirme Wolfgang Iser, dans L'acte de lecture: « Il y a une tendance, du moins dans les écrits de certains linguistes, à dévaluer la structure superficielle - la forme des énoncés proprement dite - en lui donnant le statut d'une enveloppe, d'une couverture ou d'un voile, d'une excroissance qui doit être épluchée, percée ou écartée pour arriver au noyau. »

  2. La critique littéraire en tant que recherche de significations cachées, en tant que chasse au trésor, abandonne le texte comme une coquille vide après en avoir retiré la signification.

1
$ 0.00
Avatar for Enforsys
3 years ago

Comments