La Phénoménologie Critique en tant que fondement des Sciences (4)

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La Phénoménologie Critique en tant que fondement des Sciences - Quatrième partie

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D. Du mode d'exposition dit Parataxique

Cet ouvrage - un ouvrage tel qu'il n'aurait pu être pondu par l'un de ces maudits intellectuels - a en commun avec les précédents son mode d'exposition dit parataxique - lequel est un renvoi vers la totalité fragmentée.

Parataxique ?

Qu'entendons-nous par là ?

Il partage avec les ouvrages pris au sens traditionnel du terme - ce qu'il n'est assurément pas - une entrée en matière, une introduction.

Mais il élude et contourne, tourne autour de ( para- ) l'obligation d'une transition vers un « développement » et une « conclusion ».

Et c'est la raison pour laquelle certains consommateurs de culture convaincus soupireront, rouleront des yeux et claqueront de la langue - sans parler de tout le mal qu'il se donneront pour nous dire de grandes sottises - en exigeant du dissident « anti-intellectuel » que nous prétendons être un mode d'exposition moins dépaysant, plus conforme, pour ainsi dire, aux normes hypostasiées du bon goût littéraire, du bien comme il faut, sauvagement pris à partie par les innombrables avant-gardes du vingtième siècle, que l'on s'efforce d'oublier les dents serrées et avec la force du dernier désespoir.

Le mode d'exposition parataxique se veut tout simplement la disposition autour d'un centre, d'un noyau dur, de fragments, de miettes. Le noyau dur ( Kerngehalt ), l'étymon, ( lexie que nous empruntons au Leo Spitzer des Stilstudien mais qui dénote, dans le contexte de cet ouvrage, une réalité toute autre ), est la substance même du propos et ces fragments se révèlent être des vecteurs, des points d'entrée vers ce noyau dur et vers les autres fragments.

Le lecteur se saisit de ces fragments et procède à la constitution, à la « création continuée » durant le procès de lecture de la substance du propos et des autres fragments, lesquels sont autant d'autres voies vers le « centre ».

Tel est le mode d'exposition parataxique, qui exige une participation et une attention d'autant plus intenses de la part du lecteur que la trame du texte est relâchée, brisée, en morceaux.

L'on se reportera avec profit aux obsolètes Mélanges et aux Scories (d'autres ouvrages de jeunesse) pour de plus amples précisions sur ce mode formel d'exposition, qui a choqué et su faire s'hérisser le poil sur tant de têtes de poules universitaires.

Quatrième partie - Notes

  1. Le détestable intellectuel se tient en retrait du monde, donc en retrait du matériau et de la structure intentionnelle de la Pensée qui est Pensée du matériau. L'intellectuel est cette complaisance infinie dans le royaume de l'esprit, de l'abstrait. Paul Valéry ( Rhumbs ) a bien vu le caractère abstrait du faire intellectuel : « Le métier des intellectuels est de remuer toutes choses sous leurs signes, noms ou symboles, sans le contrepoids des actes réels. Il en résulte que leurs propos sont étonnants, leur politique dangereuse, leurs plaisirs superficiels. Ce sont des excitants sociaux avec les avantages et les périls des excitants en général. »

  2. Sur le caractère de renvoi du mode d'exposition parataxique : « Il est fort probable qu'en cette étape de l'exposé le lecteur nourrisse de sérieux doutes quant à notre capacité réelle à pondre un texte « dans les règles ». Les fragments et textes courts qui à leur propre manière constituent la partie principale de notre exposé n’ont pas été réunis en un tout linéaire. Crimen laesae majestatis... La trame est molle, lâche, elle nous lâche. Encore une fois n’allons-nous pas justifier cette incapacité par l’exigence parataxique ? Nous répondons que la fragmentation de l'espace scriptural est un choix, et non une nécessité dont la détermination concrète serait inscrite en nos capacités en apparence limitées. Nous ne croyons plus réellement à la possibilité d’une totalité, et ceci n'est pas sans incidences sur ce que nous devrons nous résoudre à nommer, non sans amertume et agacement, contenu et forme. Contenu : fragmentation de l’argumentation ; forme : fragmentation de l’espace graphique. Et bien évidemment, l’un renvoie à l’autre. Nous avons le sentiment que toute autre façon de procéder nous mettrait hors mesure, hors de l’en-mesure de dire ce qui se doit d’être dit, la Vérité de et dans la brisure du contexte d’énonciation. Cette poétique, cette pure fantaisie issue d’un esprit qui se croit apparemment libre de toutes règles, réaction adolescente à un académisme étouffant, la société et l’état des forces productives esthétiques nous l’ordonnent. Ceci dit, le choix se retourne en nécessité. » ( Intoccabile, Scories )

  3. Un clin d'oeil au « Noe iste magno conatu magnas nugas dixerit » de Térence ( Heautontimoroumenos, III, v, 8 ).

  4. Au sujet de la notion de noyau réique, lire: HÜSSERL, Edmund. Logische Untersuchungen. Zweiter Band. Untersuchungen zur Phänomenologie und Theorie der Erkenntnis [ Recherches logiques 2. Recherches pour la phénoménologie et la théorie de la connaissance. Première partie ( recherches I et II ) ]. France, Presses universitaires de France, collection Épiméthée, traduit de l'allemand par Hubert Élie, Arion L. Kelkel et René Schérer, 2005, p. 212

  5. Au sujet de la notion de Kerngehalt (noyau): SPITZER, Léo. Stilstudien [ études de style ]. Paris, Gallimard, collection « Bibliothèque des Idées », traduit de l'anglais et de l'allemand par Alain Coulon, Michel Foucault et Éliane Kaufholz, précédé de Leo Spitzer et la lecture stylistique par Jean Starobinski, 1970, 536 pages.

  6. Constitution a ici la même teneur que concrétisation au sens que lui donne Roman Ingarden dans sa phénoménologie de l'expérience littéraire ( Vom Erkennen des literarischen Kunstwerks [ L'oeuvre d'art littéraire ] ).

  7. Le lecteur remarquera avec un sourire amusé que refus et volonté de sortie du système se résolvent ici en « système ». L'inéluctable systématisation de toute tentative de sortie du « système » !

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